L'abbé Louis Henri Planson
1867-1936
par Johanie de Valliaco
Biographie
Louis Henri Planson naquit le 14 mai 1867 à Thou (18), petit bourg de 330 habitants, situé en Pays-Fort, contrée à l’extrémité nord-est de la province du Berry.
Son prénom usuel est Henri.
Son père Etienne Isidore Planson, né le 5 juillet 1839 à Thou, y exerçait la profession de maréchal-ferrant; sa mère, Sophie Marie Toussaint, née le 3 février 1839 à Vailly-sur-Sauldre (18), était lingère. Ils s’étaient mariés le 29 avril 1866 à Vailly, lui à 26 ans et demi, elle à 27 ans, en présence de leurs parents respectifs : Silvain Planson et Solange Bressier d’une part, Pierre Silvain Toussaint et Marie Thérèse Mouton d’autre part. Un contrat de mariage avait été préalablement établi le 7 avril chez maître Decencière-Chaudry, notaire à Vailly.
Henri et ses parents vivaient à Thou dans une maison située au bourg. Le recensement de 1872 nous apprend qu’Etienne Isidore offrait le gîte à un ouvrier maréchal-ferrant qu’il avait engagé pour le seconder.
Les grands-parents paternels d’Henri, Silvain Planson né en 1797 à Thou et Solange Bressier née en 1802 à Sury-es-Bois (18), résidaient eux aussi à Thou, au lieu-dit La Petite Forêt situé entre Thou et Subligny. Grands-parents dont il ne profita guère puisqu’il avait à peine quatre ans au décès de son grand-père, six ans au décès de sa grand-mère.
Henri eut-il le temps de fréquenter l’école communale de Thou ? C’est peu probable. Ses parents déménagèrent après 1872 pour s’installer à quatre kilomètres de Thou, dans le haut du bourg de Vailly-sur-Sauldre, chef-lieu de canton de 1111 habitants à l’époque. Henri retrouvait ainsi ses grands-parents maternels Pierre Silvain Toussaint, serrurier, né en 1808 à Blancafort (18) et Marie Thérèse Mouton, née en 1812 à Vailly, ainsi que ses nombreux oncles et tantes Toussaint : Pierre Alexandre, maréchal-ferrant, Victor, charron, Adèle, receveuse des Postes, Séraphie Pauline et Marie-Thérèse qui, tous, résidaient route de Sury-es-Bois.
Le 14 juillet 1874, Henri eut le plaisir d’accueillir dans sa nouvelle demeure une petite sœur, Louise Henriette. L’acte de naissance de celle-ci mentionne que son père, Etienne Isidore, 35 ans, est aubergiste au bourg de Vailly. Aurait-il abandonné la maréchalerie ou cumulerait-il les deux emplois ? On peut penser que la deuxième hypothèse est la bonne, ceci n'étant pas incompatible. Au recensement de 1876, on le retrouve serrurier, comme son beau-père Silvain Toussaint et résidant place de l’église. Ceci ne signifie pas forcément que la famille ait à nouveau déménagé : on peut considérer que le haut du bourg et le haut de la place de l'église désignent le même endroit. Dans les recensements de l’époque, prénoms, âges et noms de rues sont souvent approximatifs et varient en fonction des renseignements donnés par les recensés.
Henri, neuf ans, fréquentait l’école de garçons, toute proche, tandis que sa petite sœur, Louise Henriette, restait auprès de sa maman. L’instituteur, Laurent Trainoir, avait-il remarqué que son jeune élève doué intellectuellement avait aussi des dispositions pour le dessin et la peinture ? On peut le penser.
Henri devait fréquenter assidûment l’église, elle aussi toute proche de chez lui, comme l’école. Sans doute était-il enfant de chœur auprès de l’abbé Clovis Moulin, curé de Vailly. Il y a fort à parier que celui-ci ne fut pas étranger à la vocation d’Henri. En milieu rural, le curé du village savait repérer les bons éléments et contribuer à l’éveil de leur vocation.
On peut même supposer que l’instituteur et le curé n’eurent guère besoin de cumuler leurs efforts pour convaincre Etienne Isidore et Sophie Marie de laisser leur fils se diriger vers des études supérieures. Quel père, à l’époque, n’aurait pas souhaité voir son fils devenir prêtre, instituteur ou notaire ? Quelle mère n’aurait pas été fière de donner son fils à l’Eglise ? La famille joua un rôle si essentiel dans l’éclosion de sa vocation qu’Henri dut savoir très tôt qu’il allait se destiner à la fois à la prêtrise et au professorat.
Je ne sais quand la famille déménagea une deuxième fois pour s’installer, comme le reste de la famille, route de Sury-es-Bois.
Après un cursus de sept ans à l’école publique de Vailly-sur-Sauldre qui le mena du cours préparatoire (rentrée 1873) à la classe de fin d’études 2e année (rentrée 1879), Henri, 13 ans, entra en 1880 en classe de 6e sans doute au Lycée de Bourges mais rien ne permet de l’affirmer.
A la rentrée de 1881, il fut admis au Petit Séminaire Saint-Célestin de Bourges (18), en classe de 5e. Il y resta cinq ans (5e+4e+3e+2e+ une année de rhétorique).
Henri y étudia la philo et le latin, matières qui occupaient au petit séminaire une place prépondérante. Cette école, créée en 1842, formait les futurs séminaristes tout comme des élèves qui désiraient rester laïcs.
N’étaient cependant acceptés au Grand Séminaire que les jeunes gens présentant de réelles qualités morales, spirituelles et humaines.
En septembre 1886, Henri intégra à 19 ans le Grand Séminaire de Bourges. Il y étudia la théologie cinq ans durant.
Ses études (Petit Séminaire + Grand Séminaire) durèrent au total dix ans, de 14 à 24 ans. Formation très longue donc avec internat obligatoire assorti d’une discipline fort rigoureuse.
La première étape importante de la formation ecclésiale d’Henri fut la prise de la soutane et la tonsure. Il les reçut à la fin de sa première année de théologie au Grand Séminaire, le 29 juin 1887. Il avait 20 ans. Il était officiellement considéré comme séminariste.
Cette même année, Henri fut convoqué par le bureau de recrutement de Cosne-sur-Loire (58) en vue de remplir ses obligations militaires. Le conseil de révision l’en dispensa. Sur sa fiche matricule n° 1520, on peut lire : « Absent. Dispensé, élève ecclésiastique. » On y lit également : « degré d’instruction : niveau 3 ». Le maximum. (La loi de 1872 dispensait les séminaristes du service militaire)
L’année suivante, le 29 juin 1888, Henri reçut les ordres mineurs qui lui donnèrent droit à la lecture liturgique de la parole de Dieu et officiellement la capacité de service à l’autel.
Le 29 Juin 1889, à la fin de sa troisième année de théologie, il reçut le sous-diaconat qui engage au célibat ecclésiastique et à la prière du bréviaire.
Le 29 juin 1890, il reçut, avec 71 autres ordinands, le diaconat, premier degré du sacrement de l’ordre. En l’absence de Mgr Jean-Joseph Marchal, archevêque de Bourges, parti pour Contrexéville, ce fut l’évêque auxiliaire de Bourges, son frère, Auguste Marchal, évêque de Sinope (in partibus infidelium) qui mena la cérémonie avec le Très Révérend père Albéric de l’abbaye de Fontgombault (36).
Le lundi 29 juin 1891, Henri, 24 ans, fut ordonné prêtre en la cathédrale de Bourges. La cérémonie fut encore une fois présidée par Mgr de Sinope. Elle est relatée dans la Semaine Religieuse du Berry du 4-7-1891 :
« Cent cinquante prêtres environ avaient quitté leurs paroisses pour venir honorer et encourager de leur présence leurs jeunes auxiliaires dans le ministère pastoral. Le spectacle était vraiment très beau lorsque tous tendaient la main sur les vingt-six nouveaux prêtres qui allaient être admis dans leurs rangs. A ces 26 prêtres, s’étaient joints 55 autres ordinands : 18 tonsurés, 17 minorés (dont un a reçu le même jour la tonsure), 6 sous-diacres, 15 diacres, soit ce jour là, un total de 81 ordinands."
Parmi ces vingt-six prêtres, outre Henri Planson, figurait Théophile Moreux, plus connu sous le nom de l'abbé Moreux (1867-1954), célèbre astronome et météorologue de Bourges.
Au lendemain de l’ordination, la coutume voulait que le jeune prêtre revînt au pays natal y célébrer
sa « première grand-messe » en présence de ses parents et des prêtres des environs qui faisaient acte de présence par solidarité. Il y était valorisé, on rappelait son enfance studieuse, on rendait hommage à ses parents, on louait le prêtre qui l’avait encouragé dans sa vocation.
Pour Henri, cette première grand-messe eut lieu le 30 juin 1891 en l'église de Vailly-sur-Sauldre sous l'oeil bienveillant de l'abbé Théodore Péret, successeur de l'abbé Clovis Moulin.
Au recensement de Vailly, cette même année, Etienne Isidore, son père, 51 ans, y est noté taillandier, toujours route de Sury-es-Bois. Il fabriquait des outils tranchants, cisailles, haches, serpes, pelles et faux pour les laboureurs, charpentiers et charrons du canton.
Son épouse Sophie Marie, 50 ans, et leur fille Louise, 17 ans, y sont également mentionnées.
Le 10 juillet 1891, Henri fut nommé vicaire à Saint-Amand-Montrond (18). Il y resta quinze mois.
Le vicaire étant l’assistant du curé dans une paroisse.
Le 15 octobre 1893, il reçut la charge de vicaire à La Châtre (36) puis le 25 juin 1894, celle de l’église
Saint Pierre-le-Guillard à Bourges.
Le 1er octobre 1894, à 27 ans passés, Henri intégra l’institution Sainte-Marie à Bourges comme professeur. L’orientation des prêtres vers l’enseignement était bien souvent l’apanage de ceux qui se distinguaient intellectuellement.
Le 6 octobre, l’évêque de Parium (in partibus infidelium), Mgr Claude Bardel, évêque auxiliaire de Bourges, en remplacement de l’archevêque Jean Pierre Boyer, célébra la messe en présence des vingt-cinq nouveaux élèves venus se joindre aux anciens et des nouveaux professeurs dont l’abbé Henri Planson.
Il a d’abord exprimé « les regrets de Mgr l’archevêque Jean Pierre Boyer de ne pouvoir venir présider lui-même cette fête de famille et donner à ses chers enfants un témoignage de son affection. » Puis il a rappelé que même si « les nouveaux maîtres ont encore toute l’ardeur de la jeunesse, ils ont néanmoins droit à toute la confiance des parents : ils sont instruits, ils sont pleins d’affection pour leurs élèves… ».
Pour sa première rentrée, nul doute qu'Henri dut être ému par ces paroles bienveillantes et rassurantes.
Henri fut professeur à Sainte-Marie pendant quatre ans, de 1894 à 1898.
Il y enseigna le dessin, les sciences naturelles et physiques.
On peut penser que c’est durant ces quatre années de professorat qu’Henri Planson fréquenta l’école des Beaux Arts de Bourges située place Cujas, en centre-ville. Construite en 1881, cette école dispensait des cours de dessin et de sculpture gratuits aux jeunes élèves inscrits mais aussi à des artistes qui pouvaient profiter des ateliers le soir.
En 1898, Henri, 31 ans, quitta le diocèse de Bourges pour celui de Paris.
Si l’on sait peu de chose sur son parcours ecclésial et professoral, on en sait un peu plus sur son parcours artistique.
A son arrivée à Paris, en 1898 donc, l’abbé Planson s’installa à l’hôtel Cassette, 29 rue Cassette, dans le 6e arrondissement, en face de l’Institut Catholique.
Je sais qu'il officiait en l’église Saint-Sulpice et qu'il était professeur, mais j'ignore où. Mes recherches sont restées vaines.
Le 4 avril 1900, l’abbé Henri Planson dut revenir dans le Cher pour comparaître devant le tribunal correctionnel de Bourges avec Henri Mirpied, docteur en médecine et maire de Bourges, ainsi que monsieur Bondon, ancien gardien du cimetière des Capucins, tous trois inculpés de violation de sépulture. L’affaire fit grand bruit.
L’origine du litige remontait à l’année 1897. Henri, professeur de dessin et de sciences à l’institution Sainte-Marie, voulut avoir un squelette pour son cabinet d’anatomie. Le médecin de l’institution, monsieur Imbert, en fit la demande auprès du maire de Bourges. Celui-ci remit au gardien du cimetière, monsieur Bondon, une note ainsi rédigée : « Le maire informe le gardien du cimetière des Capucins que monsieur Imbert est autorisé à prendre, dans le dit cimetière, le squelette dont il a été question entre eux. » Monsieur Bondon se mit donc à la disposition du docteur Imbert et fouilla les tombes anciennes et presque vides. Il ne tarda pas à trouver ce qu’Henri souhaitait, à savoir un squelette de femme et un crâne d’adolescent. On raconta que l’abbé Planson fut très satisfait et que le gardien reçut une honnête gratification. Mais trois ans plus tard, suite à des démêlés avec le maire, ce dernier perdit son emploi. Pour se venger, il dénonça le maire au parquet qui, vu l’ampleur de la rumeur, dut ouvrir une enquête. L’instruction fut longue… Le juge rendit une ordonnance de non-lieu en faveur de M. Mirpied et l’abbé Planson. Il déclara « que l’ordre du maire était parfaitement illégal mais que l’intérêt scientifique avait seul inspiré sa conduite de même que celle de l’abbé Planson, que l’un et l’autre avaient péché par légèreté mais que leur bonne foi restait entière. » En fait, il n’y avait pas à proprement parler de violation de sépulture puisque l’exhumation du corps avait eut lieu après les sept années réglementaires et que le squelette attendait d’être déposé à l’ossuaire. Monsieur Mirpied fut condamné à 50 francs d’amende, l’abbé Planson à 16 francs seulement. Par contre, le dénonciateur monsieur Bondon, auteur de la dite violation de sépulture, fut condamné à 100 francs d’amende.
En 1901, Henri Planson résidait au 34 rue Notre-Dame des Champs, 6e arr, cette fois tout près des collèges catholiques Stanislas et Saint-Sulpice, dans le même immeuble qui abrita entre 1871 et 1873 l'atelier du peintre Auguste Renoir. La rue Notre-Dame des Champs, fort longue, comptait de nombreux ateliers d'artistes : au 70 celui de Jean-Léon Gérôme jusqu'en 1904, au 73 celui de Jean Paul Laurens jusqu'en 1903, au 75 celui de William Bouguereau jusqu'en 1905. On peut supposer qu'Henri Planson, passionné d'art, connut ces fameux peintres.
On le retrouve en 1905 au 24 bis rue Pierre Leroux, 7e arr, près de la chapelle Saint-Vincent de Paul, puis quelques années plus tard au 7 rue de Sèvres, 6e arr.
Après avoir officié à Saint-Sulpice, Henri officia à la chapelle des sœurs de Saint-Thomas de Villeneuve, 25 rue de Sèvres, jusqu’en 1906; à la chapelle des Lazaristes, appelée aussi chapelle Saint-Vincent de Paul, 95 rue de Sèvres, jusqu’en 1910; puis à Saint-Thomas d’Aquin en 1910. Henri figure dans le Registre des Pouvoirs du diocèse de Paris de 1898 à 1918. On y apprend qu’il n’a jamais eu d’autre pouvoir que celui de célébrer la messe. Ainsi, il n’avait pas le pouvoir de confesser.
En parallèle à sa vie pastorale, l’abbé Planson cultivait sa passion pour les arts. Doué pour la peinture, la gravure et la sculpture, Henri se perfectionna auprès de Luc-Olivier Merson (1846-1920), peintre, illustrateur, prix de Rome en 1869, professeur aux Beaux Arts de 1906 à 1911 où il était chef d’atelier de peinture religieuse et d’histoire. On imagine qu’Henri fréquenta assidûment l’atelier de ce grand maître situé 115 boulevard Saint-Michel à Paris.
Henri fut également élève d’Henri Joseph Harpignies (1819-1916), peintre paysagiste, aquarelliste de l’école de Barbizon. Surnommé par Anatole France « le Michel-Ange des arbres et des campagnes paisibles », il a peint de nombreux paysages du Bourbonnais, de l’Auvergne, du Nivernais ainsi que des paysages bien connus d’Henri car proches de Vailly, ceux de Bonny-sur-Loire (45) et du canal de Briare (45). Harpignies passait tous les hivers sur la côte d’azur à Antibes et Menton (06). Henri fut-il parfois du voyage ? On peut le penser puisqu’en 1908, le nom d’Henri Planson figure à l’exposition internationale de peinture et de sculpture de Monte-Carlo et qu'il a ramené dans ses valises quelques aquarelles sur Menton.
Henri étudia également auprès de François Eugène Burney (1845-1907), graveur et illustrateur.
En 1902, Henri fut l’un des initiateurs de la Société de l’Art sacré et fut choisi pour être le directeur de l’Ecole de l’Art sacré. A ce jour, je n’ai trouvé aucun renseignement à ce sujet.
Henri donna des conférences sur l'Art religieux au Séminaire Saint-Sulpice (avant 1906) ainsi qu'au cours Jeanne d’Arc de Saint-Thomas d’Aquin.
Le 10 janvier 1903, Etienne Isidore, le père d’Henri décéda à l’âge de 63 ans et demi, laissant seules son épouse Sophie Marie, 63 ans, et sa fille Louise, 28 ans. Il fut inhumé au cimetière de Vailly-sur-Sauldre.
Henri revint souvent à Vailly-sur-Sauldre voir sa mère et sa sœur. Il en profitait pour sillonner à vélo les chemins alentours à la recherche de beaux paysages qu’il croquait sur place.
Mgr Pierre-Paul Servonnet, archevêque de Bourges de 1897 à 1909, chargea Henri de donner aux élèves du Grand Séminaire de Bourges des conférences sur l’Art religieux. Il le sollicita aussi pour collaborer avec le maître-verrier Félix Gaudin (1851-1930) à la réalisation d’un vitrail destiné au transept nord de la nouvelle église de La Châtre (36) détruite en 1896 lors de l’effondrement du clocher. Eglise qu’Henri connut bien pour y avoir été vicaire d’octobre 1893 à juin 1894. Cette verrière, offerte par Jules Cyprien Béguin, notaire à La Châtre, fut exécutée dans les ateliers de Gaudin à Paris. Henri est donc l’auteur du carton de « L’Annonciation » dans un style composite mêlant avec brio des influences néogothiques et symbolistes.
Pour la consécration de la nouvelle église, le 16 octobre 1904, Henri Planson conçut également des décors éphémères destinés à agrémenter l'intérieur et l'extérieur du nouvel édifice en cette occasion.
En mai 1905, l'abbé Henri Planson exposa pour la première fois au Salon des Artistes Français.
Ce salon de peinture, sculpture, architecture, gravure, créé en 1880, se tenait chaque année en mai depuis 1901 sous la nef du Grand Palais à Paris.
Henri y présenta une sculpture sous le n° 3532 :
un buste en plâtre "Portrait de M.V."
Il pourrait s'agir d'un buste de Marthe Videau, une amie de la famille.
En 1906, il fut admis sociétaire des Artistes Français.
Lors de cette deuxième participation au Salon, il exposa sous le n° 4452 une gravure à l' eau-forte :
"Les vieux chênes".
Ce fut en 1909 qu'eut lieu sa troisième participation au Salon. Il exposa sous le n° 2695 une aquarelle :
"Après le coucher de soleil à Menton".
En 1910, il présenta quatre aquarelles :
"Bords de la Sauldre", "Bords de la Salereine", "Bords de l'Yonne" et "Vailly"
et sous le n° 5453, une oeuvre intitulée "Les saintes bergères du Berry".
La même année, le 24 octobre, Henri participa à Bourges, salle du Duc Jean, à l’exposition d’art et d’art appliqué des élèves et anciens élèves de l’Ecole des Beaux Arts.
Dans l’Emancipateur (journal socialiste du Berry) du 27 novembre, un jourrnaliste écrivit : « J’ai été conquis par les aquarelles de M. Henri Planson. Les bords de la Sauldre qu’il nous fait connaître sont lumineux, vaporeux et charmants. »
Henri a su mettre à profit les conseils de son professeur et ami, le paysagiste et aquarelliste Henri-Joseph Harpignies, considéré aujourd'hui comme l'un des plus grands maîtres du paysage français du XIXe siècle.
Au recensement de Vailly en 1911, Marie Sophie Planson, la mère d'Henri, y figurait encore avec Louise. Celle-ci y est mentionnée artiste-peintre.
Le 29 avril 1912, Henri assista à Vailly au mariage de sa sœur. A presque 38 ans, Louise épousait Pierre Cortot, 45 ans, sans profession, né à Le Deschaux (Jura), veuf de Louise Henriette Bachelard, domicilié à Sammeron (Seine et Marne). Sur l’acte de mariage, on peut lire les noms des quatre témoins : Gilbert Rivière, 48 ans, percepteur à Vailly et ami du marié; Louis Menot, 44 ans, tailleur d’habits à Paris, ami du marié; Pierre Vattan, 63 ans, cordonnier, oncle de la mariée et Louis Henri Planson, âgé de 45 ans, professeur, frère de la mariée, demeurant à Paris, 7 rue de Sèvres.
(preuve qu’Henri Planson était bien professeur dans la capitale)
En mai de cette même année, Henri participa pour la cinquième fois au Salon des Artistes Français. Il y exposa sous le n° 1500 son chef-d'oeuvre
"Sainte Solange, patronne du Berry"
une huile que l'on peut admirer aujourd'hui dans l'église de Vailly-sur-Sauldre.
1912 fut une année faste pour Henri. A 45 ans, il devint diplômé de l’Ecole du Louvre. Cette école d’enseignement supérieur des Arts, fondée en 1882 par Jules Ferry, située à l’époque dans l’aile Mollien du Louvre dispensait à ses élèves des cours d’histoire de l’art, d’archéologie, d’épigraphie, d’histoire des civilisations, d’anthropologie et de muséologie.
Le 8 août 1912, le diplôme de l’Ecole du Louvre fut remis à Henri à l’issue de sa thèse
« La sculpture du portail de la cathédrale de Bourges ».
Henri fut également diplômé de l’Ecole nationale des Chartes, grande école créée en 1821, située à l’époque dans l’enceinte de La Sorbonne, spécialisée dans la formation des sciences auxiliaires de l’histoire. Les élèves y apprenaient à lire et à interpréter les manuscrits grecs et latins ainsi que les chartes du moyen-âge qu’ils seraient chargés de conserver.
J'ignore l'année d'obtention de son diplôme et le sujet de sa thèse, si thèse il y a.
Le 30 avril 1913, la mère d'Henri, Sophie Marie décéda à Vailly-sur-Sauldre à l'âge de 73 ans. Elle rejoignit son époux dans le caveau familial.
Je n'ai trouvé aucun renseignement sur les activités ecclésiales et professorales d’Henri durant le conflit
de 14-18 et les années qui ont suivi. Dans le Registre des Pouvoirs du diocèse de Paris, il est seulement écrit qu’en 1914 l’abbé Louis Henri Planson était précepteur. Le précepteur étant généralement engagé par une famille aisée pour assurer, moyennant rétribution, l’instruction d’un ou plusieurs enfants ou adolescents.
Mais ce peut-être aussi un ecclésiastique chargé d’instruire gratuitement des jeunes clercs, c’est-à-dire des jeunes qui se destinent à entrer dans la fonction ecclésiastique.
Quant à ses activités artistiques, elles restent très imprécises. Henri aurait exposé au Salon des Artistes Français en 1926 et 1927 quelques gravures et sculptures.
Toujours dans les années 20, en hommage aux soldats de Vailly-sur-Sauldre morts pour la France durant la première guerre mondiale, Henri exécuta un cippe funéraire en céramique, sorte de stèle qu’il offrit à l’église du village. On peut le voir actuellement sur le mur sud de la nef.
En 1925, la maison d’édition Zech et fils de Braine-le-Comte en Belgique édita un missel des saints pour lequel Henri Planson réalisa la planche frontispice ainsi que les illustrations encadrant les 372 pages de texte.
La gravure des images de l’ouvrage avait été confiée à Emile Louis de Ruaz.
Le recensement de 1931 nous apprend que l'abbé Planson, 64 ans, professeur, résidait toujours 7 rue de Sèvres et qu'il hébergeait chez lui Henri Cortot, 18 ans, dessinateur dans le 17 ème arr, son neveu, fils unique de sa soeur Louise Henriette.
En décembre 1932, à près de 66 ans, Henri devint aumônier de l’hôpital de Fontainebleau (77). Il accompagna pendant trois ans les malades dans la vie comme dans la mort.
En août 1934, au salon artistique de Fontainebleau, Henri Planson exposa une gravure représentant la Vierge de Lorenzo di Credi (1459-1537), quelques études à l'encre de chine et deux bustes dont un buste d'enfant, Doudou, que la critique a trouvé absolument délicieux (journal L'Abeille de Fontainebleau du 17-8-1934).
Du 15 au 23 juin 1935, Henri participa au Salon des Beaux Arts de Montargis (45). Il y exposa six céramiques,
six dessins à l'encre de Chine et trois aquarelles :
"Vieux puits à Trégastel", "Rue à Ermenonville" et "Château d'Ermenonville.
En août 1935, au salon de Fontainebleau, il exposa quelques émaux religieux et retint l'attention par son aquarelle " Ciel d'orage".
Ce fut sans doute sa dernière participation à une exposition.
Le 21 février 1936, alors qu’il venait de donner les derniers sacrements à un malade, Henri succomba à une hémorragie cérébrale à l’âge de 68 ans. Ses obsèques eurent lieu dans la chapelle de l’hôpital de Fontainebleau le lundi 24 février en présence de sa sœur, de sa famille et d’une assistance nombreuse dont monsieur J.L. Dumesnil, sénateur-maire de Fontainebleau et président du conseil d’administration de l’hôpital, des membres de ce même conseil d’administration, du docteur Marty, de Madame la Supérieure et de nombreuses personnalités de l’hôpital. La cérémonie fut célébrée par Emile Barbier, curé de l’église Saint-Louis de Fontainebleau, assisté de ses vicaires, de prêtres et du représentant des RR. PP. Carmes et Franciscains. Il donna lecture d’une lettre que Monseigneur Frédéric Lamy, évêque de Maux, avait écrite en hommage à son ami Henri Planson.
En voici le contenu :
« Arrivé il y a trois ans, Monsieur l’Abbé Planson s’était acquis, par ses qualités, une profonde sympathie parmi ses confrères et aussi ses amis. Il voulut donner à ce si beau ministère des malades, ses dernières forces. Il tombe subitement trop tôt pour nous. Homme de très haute et très fine culture, il avait gardé un goût très prononcé pour l’étude. Il avait été l’un des initiateurs de la Société de l’Art sacré fondée en 1902 et choisi pour être le directeur de l’Ecole de l’Art sacré. Il fut chargé par Mgr Servonnet, archevêque de Bourges, de faire des conférences d’art religieux aux élèves de son Grand Séminaire; de même il donna des conférences au Séminaire de Saint-Sulpice et au Cours Jeanne d’Arc de Saint-Thomas d’Aquin. Ne travaillait-il pas encore ces jours derniers pour embellir une de nos églises restaurées ? Veuillez dire à sa sœur, à notre communauté de religieuses, à MM. les Membres du Comité de l’Hôpital, à ses amis et confrères, à nos chers malades, mes sentiments de compassion. »
L’Archiprêtre Barbier ajouta au nom de la paroisse ses condoléances les plus émues. Il rappela que l’Abbé Louis Henri Planson, élève diplômé de l’Ecole du Louvre et de l’Ecole des Chartes, fut un artiste délicat et un prêtre au grand cœur, justifiant si bien la parole de Pie X : « Je veux que mon peuple prie sur de la beauté ».
Il ajouta : « Ses derniers instants ont été consacrés trop intensément pour son âge et pour sa santé
-mais peut-on trop donner à Dieu ? - à la mise en état des vitraux de l’église de Gravon.
Monsieur l'abbé Planson ne pouvait mieux terminer sa vie que dans la lumière."
Aussitôt après l’office, la dépouille de Louis Henri Planson fut transportée à Vailly-sur-Sauldre où se déroula une seconde cérémonie funèbre présidée par l’abbé Jarraud, doyen de Jars (18) assisté de tous les prêtres du canton auxquels s’était jointe une foule nombreuse et recueillie. L’abbé clôtura l’office par ces paroles :
« Une pensée consolera ceux qui restent, c’est que ce cher défunt est parti, comme le Divin Maître, en faisant le bien, en travaillant jusqu’au bout pour le salut des âmes et pour la beauté de la Maison de Dieu. »
L’abbé Louis Henri Planson fut inhumé à Vailly-sur-Sauldre, dans le caveau familial, avec ses parents
carré 2 - portion 2 - allée 3 - tombe 7.
Il y fut rejoint quelques années plus tard par Henri Cortot, son neveu décédé durant le conflit de 39-45.
Lorsque sa sœur, Louise, 90 ans, décéda à son tour le 31 juillet 1964 en son domicile de Vailly-sur-Sauldre, route de Sury-es-Bois, les oeuvres d'Henri qu'elle avait héritées furent vendues à l’encan.
On trouve donc encore quelques huiles et aquarelles chez des habitants de Vailly et des environs.
Les fragiles céramiques n'ont semble-t-il pas résisté aux assauts du temps.
Les esquisses jaunies des tableaux religieux furent brûlées.
Partis aussi en fumée les dessins à la plume de paysages champêtres, de collines ondulantes, d’arbres centenaires, de frondaisons luxuriantes, de cours d’eau romantiques de ce Haut-Berry que
l’Abbé Louis Henri Planson chérissait tant.
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